Note d’intention du scénario

Plusieurs raisons ont motivé l’écriture des Vies d’Elise :

Avant tout parce que je désirais écrire quelque chose pour une héroïne, et non un héros. Je voulais que ce soit une jeune fille qui ait le beau rôle et que les éléments masculins viennent en contrepoint de ses aventures à elle.

D’où une recherche sur une héroïne… qui n’en est pas une. Elise ressemble à ces milliers de jeunes filles qui ne se sentent accrochées par rien d’essentiel. Elise ne s’occupe pas du tout du monde extérieur : politique, évènements, réchauffement de la planète etc… elle ne se sent pas concernée. Son univers familial n’est pas non plus suffisamment attractif pour l’intéresser : au fond, peu importe le film, l’expo, voire le film où ses parents la trainent. L’amour est encore inexploré : lointain, uniquement vécu par portable interposé, il ne peut pas lui apporter une profonde raison de vivre. Quant aux études, n’en parlons pas : c’est une obligation à laquelle elle se plie puisqu’il faut bien ! Donc Elise vit, mais elle vit mal.

Ne soyons pas dupes : mon personnage, s’il n’y avait pas les livres et les échappées vers le rêve, qui lui fournissent une stabilité imaginaire fragile mais sûre, Elise donc trainerait sa vie, ferait des études sans motivation, se marierait, aurait des gosses etc… jusqu’à disparaitre sans que personne ne l’ait vraiment remarquée. Elle ne se suiciderait pas, non, ce n’est pas son genre, elle n’en aurait ni l’envie, ni la force…

Elise va donc se créer une autre vie. Dans les rêves, par les rêves. Mais qui, normalement, va l’aider à vivre, à lui donner justement cette motivation, cet élan qui lui manquent. Or, tout dégénère et Elise sera encore plus mal après le rêve qu’avant ! Le rêve l’a enfoncée un peu plus. Le mal de rêve devient le mal de vivre tout court, puisqu’à présent même le rêve lui est refusé !

C’est avant tout la psychologie d’Elise – personnage sans envergure, sans relief, qui acquiert grandeur et force avant de sombrer dans une quasi-folie peut-être totalement imaginaire – c’est ce cheminement qui fait tout l’intérêt du film.

Mais au lieu de faire un film psychologique, j’ai préféré donner une ambiance fantastique à cette évolution du personnage. En quelque sorte, mixer le mal être de mon héroïne à un space opéra, à un combat intersidéral entre des puissances contradictoires.  Faire que le rêve, servant uniquement à Elise de tremplin pour accéder enfin à un monde acceptable et intéressant, devienne une affaire d’état ! Que ce rêve implique la terre entière avec des conséquences tragiques, des morts, des traces indélébiles dans les esprits et les paysages. Personne ne sort indemne du rêve !

Quant au rêve lui-même, il n’était pas question de le traiter « philosophiquement ». Bachelard n’a pas sa place ici. Mais j’ai toujours été intéressée par ces univers – parallèles – conçus dans le rêve. Et puis cette confusion d’un rêve qui a l’air vrai avec une vérité apparemment réelle qui n’est peut-être encore qu’un rêve. Outil par excellence de cet imbroglio, le film ne peut qu’accentuer encore les ambigüités qui ponctuent le parcours d’Elise.

Je pourrais dire aussi que c’est un film sur la solitude. Sur l’absence totale de véritables liens entre les personnages. Même dans le rêve, les personnages hésitent à dire leurs sentiments, à les montrer. Ne parlons pas de la réalité !

Un film également sur le « même et l’autre », avec ces deux jumeaux qui se sont perdus puis retrouvés pour le pire. Ces deux jumeaux unis par des liens plus forts que ceux qu’ils ont tissés séparément.

Enfin, c’est un film sur le Gris : le gris de la vie quotidienne, le gris du Royaume où Elise se trouve projetée, le gris des rues de Prague, le gris des neiges sales, le gris de l’asphalte jonché de corps ensanglantés, le gris taché de rouge. Rouges comme ces coquelicots qui perdent leurs pétales au soir de leur vie.

Scénario disponible sur demande : me contacter

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